Compte rendu
Les Arabes israéliens sont confrontés à un racisme croissant
LE MONDE | 11.12.07 | 14h44 • Mis à jour le 11.12.07 | 14h44
JÉRUSALEM CORRESPONDANT
Le racisme entre juifs et Arabes d'Israël n'a jamais été aussi fort, dénonce l'Association pour les droits de l'homme en Israël (ACRI), dans son rapport annuel. Publié samedi 8 décembre, ce rapport de 70 pages estime que les incidents racistes envers les Arabes ont augmenté de 26 % en 2006. "Nous sommes une société qui vit dans un régime démocratique mais dont les institutions sont minées et dans laquelle les résidents ont un statut différent", indique Sami Michaël, le président de l'ACRI, qui note l'accroissement des remarques racistes, des politiques discriminatoires et des violences policières.
S'appuyant sur les études de différents organismes indépendants, l'ACRI souligne que 55 % des juifs souhaitent voir l'Etat encourager le départ des Arabes d'Israël tandis que 78 % sont hostiles à l'intégration des partis politiques arabes au sein du gouvernement. Pour étayer son constat, l'ACRI cite plusieurs chiffres : 50 % des juifs sont inquiets en entendant parler arabe dans la rue, 31 % en éprouvent de la haine et 30 % de l'hostilité, alors qu'ils n'étaient que 17,5 % en 2005.
Les trois quarts des juifs interrogés ne voudraient pas vivre dans le même immeuble que des Arabes, 61 % ne souhaitent pas que des Arabes pénètrent chez eux et 55 % pensent que juifs et Arabes devraient avoir des lieux de divertissement séparés. Parmi les étudiants, 69 % estiment que les Arabes ne sont pas corrects et 75 % qu'ils ne sont pas "cultivés, éduqués et propres".
Selon l'ACRI, ces attitudes à l'égard de la population arabe (20 % des Israéliens, soit 1,3 million d'habitants) se traduisent par une politique discriminatoire à la Knesset (Parlement), sous forme de textes de loi voulant interdire aux non-juifs l'achat de terres, ou le droit de vote aux citoyens qui n'accomplissent par leur service militaire, ce qui est le cas des Arabes mais aussi des religieux juifs orthodoxes.
Pour Mohammed Barakeh, député arabe du parti Hadash, ce constat n'est pas une surprise. "C'est la conséquence naturelle d'une campagne raciste conduite par les dirigeants politiques et militaires ainsi que le résultat de politiques racistes anti-arabes mises en place par les gouvernements consécutifs", affirme-t-il. "Le racisme est devenu la norme de la société israélienne", déplore encore le député Ahmed Tibi.
Les parlementaires arabes dénoncent continuellement le comportement discriminatoire des autorités israéliennes à leur égard. Les témoignages des voyageurs arabes soumis à des vexations et des humiliations lors des contrôles de sécurité à l'aéroport Ben-Gourion ne sont qu'un exemple parmi d'autres.
Les deux communautés vivent de plus en plus séparées et des voix s'élèvent pour défendre l'idée d'un rattachement des Arabes israéliens à un éventuel Etat palestinien. Régissant à la publication du rapport de l'ACRI, le président Shimon Pérès a estimé, dimanche 9 décembre, qu'il fallait se dresser contre "cette dure et intolérable réalité". Mais pour Yitzhak Lévy, ancien ministre de l'extrême droite : "Si les Arabes israéliens acceptaient leur statut de minorité et cessaient de coopérer avec les Palestiniens et les pays ennemis, la situation serait totalement différente."
Michel Bôle-Richard
Article paru dans l'édition du 12.12.07.